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Quotient familial : polémique pour plus d'équité ?

Après la seconde guerre mondiale, la création du quotient familial devait favoriser la natalité, en octroyant un avantage fiscal qui augmentait avec le nombre d'enfants, mais aussi avec le niveau de revenu imposable. La politique familiale a bien bénéficié de cette mesure puisque le taux de fécondité français est aujourd’hui un des plus élevés d’Europe (2,01 enfant par femme), et le taux d’emploi des femmes entre 25 et 49 ans est de 82 %. Bien sûr, le quotient familial est plafonné mais à un niveau plutôt élevé (en 2011, l’économie d’impôt maximum est fixée à 2 336 € pour chaque demi-part supplémentaire). Pourtant, comme le prévoit la Constitution de 1958, le barème de l'impôt doit dépendre de la capacité contributive des ménages.

Aujourd'hui, sur 36,2 millions de foyers fiscaux (2009), 15,7 millions de foyers sont imposables et bénéficient du quotient familial tandis que les 20.5 millions de foyers restants ne sont pas concernés par le quotient familial qui ne s'applique pas : il s’agit essentiellement des familles les plus pauvres et des familles monoparentales.

Il apparait évident que le barème du quotient familial semble, à notre époque, trop généreux par rapport au "coût" réel des enfants.

Utiliser le budget du quotient familial pour donner un chèque aux non-imposables et un crédit d'impôt aux foyers imposables, ne brise pas la politique familiale. Il s'agit surtout d'adapter un système d'après-guerre à la famille d'aujourd'hui, afin de le rendre plus juste pour toutes les familles, en opérant un transfert de richesses des plus aisés vers les plus modestes, à nombre d’enfants identiques. Effectivement, c’est surtout un choix politique, un choix de valeurs. Le crédit d'impôt existe déjà en Allemagne, au Royaume Uni, aux États ou encore en Italie. Il n'y a rien de révolutionnaire !

Quotient familial

D'autant que la direction générale du Trésor, qui dépend du ministre de l’Économie et du Budget, a publié, en avril 2011, une note de 150 pages commandée par le Haut conseil de la famille "Avis sur l'architecture des aides aux familles : quelles évolutions pour les 15 prochaines années ?", dans laquelle elle donne des pistes de réforme du quotient familial, dont l'une consiste à remplacer le quotient familial par un crédit à l'impôt : "les mesures d’abattements proportionnel et forfaitaire ne modifient que marginalement les propriétés de redistribution verticales propres au quotient familial. En revanche, la réduction d’impôt induit une redistribution verticale des familles les plus aisées vers les familles modestes à aisées plus significative". Ce qui signifie que le fondement du quotient familial resterait le même mais permettrait une redistribution plus équitable. Par conséquent les 50 % les plus riches reverseraient 3,5 milliards aux 50 % les plus pauvres. Aujourd'hui, les 10 % les plus riches des familles captent plus du quart du budget du quotient familial : 2,9 milliards d'euros sur les 10 milliards que coûtent le quotient familial.

La direction générale du Trésor penche dans sa note pour ce scénario qui "présente, selon elle, des effets globaux et de redistribution entre familles nettement plus larges. Bénéficiant, contrairement aux autres dispositifs, aux familles non-imposables, le crédit d’impôt conduit à redistribuer plus fortement aux familles pauvres et modestes." En outre, "il permet de réduire de 6,5% les inégalités de niveau de vie au sein des ménages avec enfants".

Il est vrai qu’une partie des classes moyennes pourrait souffrir d'une suppression du quotient familial. Ce ne sont pas elles qu’il faut viser évidemment, ce sont les tranches les plus élevées de l'impôt, c'est-à-dire les ménages qui n'ont pas besoin du quotient familial pour boucler leurs fins de mois.

Comme l’indique Claude Martin, directeur de recherche au CNRS, titulaire de la chaire "social care - lien social et santé" à l’École des Hautes Etudes en Santé Publique, "le quotient familial n'est qu'une mesure parmi d'autres. Et d'ailleurs, ce n'est pas elle qui explique la bonne fécondité de la France mais les services mis à disposition des familles. Quand on choisit d'avoir un enfant, ce que l'on regarde avant tout, c'est si on peut concilier vie familiale et vie professionnelle".

En bref, le système du quotient familial est égalitaire, mais il n’est pas équitable puisque le bénéfice que tirent les familles ayant un revenu élevé est plus important que celui octroyé aux familles à faible revenu ; sans oublier que les familles non imposables (un ménage sur deux en France) n’en bénéficient pas.

Le quotient familial fait partie de la fiscalité. Y toucher implique de revoir la politique fiscale dans sa globalité. L'utilisation du quotient familial comme sujet de bataille de la campagne électorale ne devrait pas avoir lieu : sur le fond - être plus équitable – devrait faire consensus entre la droite et la gauche. Bien sûr, traditionnellement, à droite, la famille et la natalité sont mises en avant en prônant l’aide à toutes les familles et le soutien aux classes moyennes ; tandis qu'à gauche, le principe est de favoriser une répartition plus juste des prestations afin d'aider davantage les familles modestes et de compenser les inégalités de la naissance. Jouer sur la peur pour garder les gens dans le conservatisme n’est pas bon. Il est dommage de faire rentrer la famille, attaquée sous cet angle, dans la campagne, mais le but est sans doute d'ouvrir la porte à d'autres sujets...

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